L’Europe s’apprête à revoir significativement son budget consacré à la défense. Ursula von der Leyen a récemment annoncé un plan ambitieux de 800 milliards d’euros pour « réarmer » le continent. Bien que cela ne touche pas directement l’industrie automobile, certaines entreprises pourraient en tirer avantage. En Allemagne, des sociétés du secteur de la défense envisagent d’utiliser leurs infrastructures pour intensifier leur production.
La situation en Europe est tendue depuis plusieurs semaines. Le changement de cap des États-Unis influence directement les perspectives du Vieux continent. Les pays membres s’organisent pour renforcer leurs capacités de défense. La présidente de la Commission européenne a déclaré que « l’Europe fait face à un danger clair et immédiat qu’aucun d’entre nous n’a connu durant sa vie d’adulte ».
Le secteur automobile sauvée par la défense ?
Néanmoins, les fabricants d’armements ne sont pas encore prêts à faire face à une demande aussi élevée. D’après Reuters, plusieurs entreprises allemandes, spécialisées dans les chars, radars et drones, cherchent à augmenter leur capacité de production. Dans le même temps, les grands noms de l’industrie automobile, qui ont été historiquement le pilier économique de l’Allemagne, continuent de supprimer des postes et de fermer des usines.
Pour 2024, l’Allemagne a même perdu son titre de « champion de l’électrique » en Europe, avec une baisse de 27,4 % des ventes de véhicules propres l’année précédente. Ce constat inquiétant reflète la situation délicate de l’industrie automobile à une époque où le Royaume-Uni s’est hissé à la première place avec 382 000 unités livrées. Cependant, les constructeurs allemands pourraient trouver une issue à leur crise actuelle.
Des usines vont être réaffectées en Europe
Le géant Rheinmetall, reconnu comme le premier fabricant de munitions en Europe, a récemment annoncé son intention d’adapter deux de ses usines, actuellement dédiées à la fabrication de pièces automobiles, pour produire des équipements de défense. Parallèlement, Hensoldt, spécialisé dans la fabrication des systèmes radar TRML-4D utilisés par l’Ukraine, envisage d’embaucher 200 travailleurs qualifiés dans l’automobile provenant de Bosch et Continental.
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Oliver Doerre, PDG de Hensoldt, a exprimé sans ambages à Reuters son souhait de « profiter des difficultés de l’industrie automobile ». Les actions des acteurs allemands de la défense, tels que Rheinmetall, Thyssenkrupp, Hensoldt et Renk, ont toutes enregistré une hausse comprise entre 3,4 et 8,3 % le mercredi 5 mars. Cette tendance s’observe également chez plusieurs entreprises du secteur de la défense en Europe.
Des gains de productivité à moyen terme
Face à la compétitivité croissante des fabricants chinois, les entreprises européennes pourraient avoir l’opportunité de « se refaire ». Cette dynamique semble prometteuse pour l’économie allemande. « À moyen terme, l’expérience a démontré que des investissements militaires peuvent générer des bénéfices significatifs en termes de productivité, de retombées économiques et d’innovations technologiques », selon l’IfW de Kiel.
C’est une véritable aubaine pour l’Allemagne, qui possède l’une des infrastructures de production les plus performantes d’Europe. Élever les dépenses en matière de défense à 3 % du PIB pourrait « créer 245 000 emplois directs et indirects, générant près de 42 milliards d’euros ». À titre comparatif, l’industrie de la sécurité et de la défense employait 387 000 personnes en 2022, soit moins de la moitié des effectifs du secteur automobile à la même période.
Attention à ne pas délaisser l’électrique
Exploiter des capacités sous-utilisées dans le secteur automobile contribuera « à maintenir l’infrastructure manufacturière établie en Allemagne tout en soutenant la production d’équipements militaires », assure le PDG de Hensoldt. Renk, fabricant de transmissions pour chars, pourrait également diversifier sa production en intégrant des usines automobiles.
Toutefois, il est crucial de ne pas négliger la production de voitures ou d’ignorer les investissements dans le secteur de l’électrique. Si cette approche semble avantageuse pour les fabricants, ses effets négatifs sont à prévoir. Pendant que les ressources humaines européennes se concentrent sur la fabrication d’armements, la Chine continue d’avancer. Le fossé entre les marques traditionnelles et les acteurs chinois pourrait s’élargir.
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