Le géant chinois des batteries pour voitures électriques se tourne vers l’Europe

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Le secteur européen des batteries pour voitures électriques est en pleine mutation. Le grand nom chinois CALB, concurrent direct de CATL, vient de dévoiler son projet d’implantation au Portugal avec un investissement significatif de 2 milliards d’euros. Cette initiative s’inscrit dans une démarche globale d’expansion internationale, d’autant plus que le besoin de solutions de stockage énergétique augmente continuellement.
Le Portugal, terre d’avenir pour les batteries électriques
La sélection de Sines pour l’édification de cette méga-usine n’est pas le fruit du hasard. Cette ville portuaire offre des avantages stratégiques non négligeables qui ont su convaincre le géant asiatique. Ses installations sont logées sur la côte atlantique et abritent un des ports les plus importants d’Europe, garantissant ainsi une logistique efficace pour le transport des matières premières et l’exportation des batteries terminées.
Le Portugal possède par ailleurs les plus grandes réserves de lithium en Europe, un élément clé pour les batteries modernes. Cette proximité avec la ressource constitue un atout majeur pour diminuer les coûts de production et sécuriser la chaîne d’approvisionnement dans un contexte mondial où l’accès aux minéraux stratégiques devient essentiel.
La relation diplomatique solide entre le Portugal et la Chine a également favorisé cette décision. Malgré les tensions commerciales grandissantes entre la Chine et certains pays européens, le Portugal s’affiche comme un partenaire favorable aux investissements chinois. Cette dynamique de « diplomatie économique » se traduit aujourd’hui par la promesse de créer 1 800 emplois directs, un argument puissant pour les décideurs locaux.
S’implanter au Portugal plutôt qu’en Espagne
CALB avait d’abord envisagé une implantation à Algésiras en Espagne, mais plusieurs éléments ont orienté le choix vers le Portugal. Une analyse comparative a mis en lumière des insuffisances d’infrastructure en Espagne.
Les résultats de l’étude indiquaient notamment :
- Une connectivité multimodale supérieure à Sines (port en eau profonde, réseau ferré)
- Un soutien politique plus affirmé des autorités portugaises
- Des incitations fiscales et administratives plus intéressantes
- La proximité des réserves de lithium précitées
Ce choix illustre la compétition acharnée entre les pays européens pour attirer ces investissements cruciaux dans le secteur des batteries, considéré comme stratégique pour l’avenir de l’industrie automobile du continent.
Gigafactories : l’Europe se renforce
Avec l’arrivée de cette nouvelle usine, CALB rejoin un écosystème européen en pleine expansion dans la fabrication des batteries. Selon les données récentes de l’Association des Constructeurs Européens d’Automobiles (ACEA), l’Europe compte actuellement 42 gigafactories en activité, même si leur répartition géographique n’est pas équilibrée.
Pays | Nombre de gigafactories | Principaux acteurs |
---|---|---|
Allemagne | 12 | CATL, Volkswagen, Tesla |
France | 7 | ACC, Verkor, Envision AESC |
Espagne | 6 | PowerCo, LG Energy Solution |
Italie | 2 | FPT, FAAM |
Hongrie | 5 | Samsung SDI, SK Innovation |
Autres | 10 | Northvolt (Suède), FREYR (Norvège) |
Avec ses 12 installations, l’Allemagne demeure en tête, suivie par la France et l’Espagne. Cette concentration reflète la solidité historique de ces nations dans l’industrie automobile et leur volonté de s’adapter à l’électromobilité.
CALB face à une concurrence déjà bien établie
Le principal rival de CALB, le titan CATL, s’est déjà implanté en force en Europe, notamment en Allemagne où son usine d’Erfurt, d’une capacité de 8 GWh, est en train de s’agrandir. CATL continue également son développement en Hongrie et en Espagne.
Pour CALB, le défi sera d’accélérer son développement en proposant des technologies innovantes et en établissant des partenariats avec des constructeurs européens. L’entreprise devra prouver la fiabilité et la performance de ses batteries dans un marché caractérisé par une concurrence de plus en plus sévère et des normes de qualité élevées.
Les fabricants européens cherchent à diversifier leurs approvisionnements pour ne pas dépendre d’un unique fournisseur. Cela offre à CALB une chance de se positionner comme une alternative viable face aux géants déjà présents.
Défis importants pour les batteries en Europe
Aller de l’avant dans ce secteur complexe n’est pas simple. Le cas récent de Svolt est révélateur des difficultés ; cette société chinoise a dû abandonner ses projets d’usines en Allemagne, citant une demande du marché en dessous des attentes.
En Italie, l’échec du projet Italvolt à Scarmagno (près de Turin) illustre également la vulnérabilité de certaines initiatives. Parallèlement, l’avenir de l’usine de Termoli, prévue pour être convertie par ACC (joint-venture entre Stellantis, Mercedes-Benz et TotalEnergies) pour la production de batteries, est incertain. Stellantis a confirmé qu’elle continuera à produire des boîtes de vitesses automatiques à cet endroit, repoussant la transformation vers les batteries.
Ces situations démontrent que la transition de l’industrie automobile européenne vers l’électrification n’est pas un processus évident. Cela dépend des caprices du marché, des stratégies changeantes des constructeurs et de considérations politiques souvent complexes.
Vers une souveraineté industrielle en Europe
L’implantation de CALB au Portugal s’inscrit dans un cadre plus large où l’Europe aspire à créer une filière batterie autonome. Face à la suprématie asiatique dans ce secteur vital, l’Union Européenne a mis en place en 2017 l’Alliance européenne des batteries pour promouvoir la production locale.
Pour vous, consommateurs de voitures électriques, la multiplication des usines de batteries en Europe pourrait induire plusieurs effets bénéfiques :
- Une baisse potentielle des coûts grâce à une concurrence accrue
- Des chaînes d’approvisionnement plus courtes, diminuant ainsi l’empreinte carbone des véhicules
- Des innovations technologiques accélérées par la compétition
- Une meilleure adéquation aux spécificités et attentes du marché européen
Ainsi, l’arrivée de CALB au Portugal représente plus qu’un simple investissement industriel. C’est l’amorce d’un nouveau chapitre dans la bataille technologique et industrielle entre l’Europe et l’Asie pour maîtriser cette technologie essentielle du XXIe siècle. Dans ce panorama en constante mutation, le Portugal s’affirme désormais comme un acteur clé de la révolution électrique européenne.