La semaine passée a été marquée par l’inauguration par Yamaha d’une nouvelle ligne de production consacrée aux moteurs pour les vélos électriques assistés au sein de son établissement basé à Saint-Quentin, dans l’Aisne. Ce fut une opportunité pour converser avec Olivier Prévost, le chef de la direction générale de Yamaha Europe.
Un léger recul est observé dans le marché du vélo, qui n’est en réalité qu’un retour à la normale après la période du COVID. Le marché du vélo, en particulier celui des vélos électriques assistés, est perçu comme un nouvel eldorado par les fabricants, avec des projections estimées à 69 milliards de dollars d’ici 2029 (contre 56,16 milliards en 2024). Tout ceci fait sens au regard du fait que les vélos entrent dans la catégorie des produits RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises), lesquels représentent un vecteur d’investissement (en réduisant le risque), justifiant ainsi le dynamisme du marché du vélo.
Au gré de l’inauguration par Yamaha de cette chaîne dédiée aux vélos électriques assistés dans son usine de Saint-Quentin (Aisne), le P.-D.G. de Yamaha Europe, Olivier Prévost, a accepté de répondre à nos questions.
La mobilité en ville tend à s’individualiser énormément depuis le COVID. Les gens sont de plus en plus enclins à opter pour un moyen de transport individuel, autre que l’automobile, moins couteux à l’achat et surtout à l’usage. Les trottinettes électriques, les skates électriques et les gyroroues ont ainsi vu le jour. Est-ce que Yamaha envisage de se tourner vers ces alternatives au vélo ?
» Au cours des dernières années, nous avons assisté à l’éclosion d’un grand nombre de produits électriques. Cependant, leur usage n’était pas clairement délimité et ils n’étaient pas réellement réglementés. Ils ont été à l’origine de quelques problèmes et accidents. L’offre de la mobilité électrique devient de plus en plus claire, avec l’apparition de produits plus traditionnels comme le vélo. Nous envisageons également le développement d’un véhicule électrique doté de quatre roues. Dans tous les cas, notre objectif est de créer des produits industriels viables sur le long terme, avec une utilisation et un cadre d’utilisation clairement définis. »
Les trottinettes sont justement un sujet intéressant. En 2022, les Français étaient prêts à payer en moyenne 500 euros pour en acquérir une. La somme a chuté à 350 euros en 2023. On note une rationalisation de la dépense consacrée au moyen de transport. Cependant, le prix des vélos a explosé et ce, bien souvent sans justification. Du coup, les ventes ont baissé, notamment parce que beaucoup sont déjà équipés. Comment Yamaha va-t-elle se positionner sur le marché ? Car le moteur électrique et la batterie sont toujours mentionnés comme les éléments les plus coûteux d’un VAE.
» Nous observons généralement le même phénomène pour toutes les catégories de produits. Des acteurs font leur apparition sur le marché en un rien de temps, mais ils manquent de connaissances, de services, de réseau et de fiabilité. Les constructeurs historiques comme Yamaha ou Honda par exemple, mettent un point d’honneur à prendre le temps de développer des produits matures et fiables. De ce fait, il faut se montrer patient. Lorsque les produits seront bien implantés que les productions seront stables, les coûts de production seront rationnalisés et cela impactera les prix. »
Cette usine sera-t-elle en mesure de produire des scooters électriques ?
» Nous disposons de chaînes de production capables de produire 80 000 unités à moteurs à combustion interne. Il ne sera pas compliqué d’ajuster les chaînes pour qu’elles puissent produire des unités à moteur électrique. »
Pour résumer, Yamaha ne produit pas uniquement des ensemble moteur/batterie pour les vélos électriques, mais également des vélos à assistance électrique. Même si les chiffres de vente ne sont pas au niveau escompté, l’objectif de la stratégie ne vise pas ces ventes en grande quantité. Le but est d’inciter les clients Yamaha à opter pour le vélo lorsqu’ils viennent pour leurs motos ou leurs scooters en distribuant les vélos dans les concessions. C’est une façon d’afficher leur présence sur le marché. On peut observer la même stratégie chez Toyota avec son vélo-cargo qui a principalement pour objectif d’être essayé par les clients pendant que leur véhicule est en révision.
Un autre levier est la vente de parcs de VAE aux localités pour la création de services de partage de vélo.
Quelle est la valeur ajoutée de Yamaha par rapport à d’autres grands acteurs du marché tels que Brose, Shimano, Bafang ou Bosch ?
» Notre premier point fort est l’innovation. Nous cherchons à sans cesse améliorer nos produits. Le deuxième est notre proximité avec nos clients, ceux qui nous achètent nos produits. »
Cette inauguration fut perçue comme une avancée majeure pour la compagnie et les employés de l’usine, bien qu’elle ait été empreinte d’une certaine réserve. Certains diraient qu’elle est très inspirée de l’approche japonaise. D’autres la qualifieraient plutôt comme une attente quelque peu fébrile. En effet, les dernières années ont été marquées par des signaux confus envoyés par le gouvernement. Yamaha souhaite obtenir sa part d’un marché qu’elle estime très prometteur. La question est de savoir si ce marché restera assez important pour que chaque aspirant puisse être satisfait de sa part.